Qui s’assemble se ressemble !


Par Fr. Guy Musy OP


On doit à saint Anselme, moine du 11ème siècle, le traité intitulé : « Cur Deus homo ?». En français : « Pourquoi Dieu s’est fait homme ? » Une question qui paraîtra assurément saugrenue aux athées et même à ceux qui estiment que Jésus ne fut qu’un homme, sans doute plus respectable et fréquentable que la plupart, mais, tout de même, rien de plus qu’un homme.


Au contraire, pour Paul qui croit en Dieu et en Jésus son Fils, c’est une évidence : « Quand les temps furent accomplis, Dieu a envoyé son Fils né d’une femme » (Gal 4, 4).


Mais alors, pourquoi Dieu a-t-il choisi cette façon de venir à notre aide, faisant de son Fils l’un de nous, jusqu’à souffrir et mourir comme nous tous ? Pourquoi a-t-il voulu que son Fils naisse d’une femme, alors que sa toute-puissance aurait pu choisir pour nous sauver un chemin plus direct et moins douloureux ?


Cette question n’est pas innocente pour les croyants que nous voulons être. Elle est même actuelle en ce temps où se multiplient les « spiritualités » qui n’envisagent le divin qu’idéalement, sans soupçonner ni concevoir qu’il puisse prendre notre visage


Des réponses à cette question ? En voici deux, approximatives sans doute, que j’ai recueillies autour de moi. Je vous les livre en toute simplicité. Peut-être en ferez-vous votre miel.    


Tout d’abord, celle-ci. En prenant chair d’une femme, Dieu, à travers son Fils, recherche notre compagnie, notre contact, notre familiarité. En tout premier lieu, Il se rend proche de Marie qu’il a choisie comme mère. Mais encore de tous les humains dont il devient le frère.


Notre Dieu aime parler à ses enfants et converse avec eux quand ils deviennent grands. Comme il le faisait déjà au jardin de la Genèse, quand il se promenait à la brise du soir. En s’incarnant, Dieu devient donc notre compagnon de route, notre confident. Son nom est Emmanuel, Dieu-avec-nous, Il ne nous abandonne pas, quels que soient les méandres de notre histoire. En sommes-nous conscients ?


Mais il y a plus. En naissant d’une femme, Marie de Nazareth, Dieu a fait le pari de nous ressembler. Marie lui donne ses yeux, son visage, son teint, son caractère. C’est encore ses traits que l’on pouvait retrouver sur son visage défiguré et  torturé aux jours de sa passion.  Descendu de sa croix, reposant sur le sein de Marie, ses  yeux éteints étaient encore ceux de sa mère. Comme il nous arrive de lire dans le visage d’un être aimé celui des parents qui l’ont porté.


Dieu nous ressemble donc, puisqu’il est devenu en Jésus l’un de nous. Mais nous pouvons lui ressembler à notre tour, A force de le côtoyer, nous adoptons ses mœurs, sa manière de vivre et de penser.


Nous apprenons à aimer ce qu’il aime et à nous détourner  de ce qui lui déplaît. Comme  deux vieux époux qui finissent par se ressembler et même se confondre tant ils ont vécu proches l’un de l’autre.  


Et  qui l’a le mieux approché que Marie sa mère ? La sainteté de son Fils a déteint sur elle. A tel point qu’elle est « Immaculée », la « Panagia – Παναγία », celle qui est pleinement sainte, comme les Grecs l’appellent.


Un mode singulier de ressemblance qui n’appartient qu’à elle, mais dont nous avons aussi notre part. Par touches successives, le Fils de Dieu imprime sa marque dans notre esprit et nos corps déficients. Notre espoir est de faire nôtre cette parole de Paul : « Ce n’est plus moi qui vit ; c’est le  Christ qui vit en moi ».